Naissance de Eléonore (long!)

Comme tout les récits de naissance, celui ci est incomplet et imparfait - la mémoire ré-ecrit les faits à une vitesse... je laisse donc parler les images telle que ma mémoire les a re -ordonné.

J'en profite pour vous dire un enorme merci pour tout vos petits mots et vos felicitations - vous avez été à mes côtés pendant ce long voyage et je vous en suis vraiment très reconnaissante - encore une fois un cercle de femme qui porte avec une energie incroyable.
Pour vous donc l'histoire de la venue au monde d'Eleonore...

Tout a commencé avec la galette des rois enfin ou la pâté feuilletée. La journée semblait s’incrire dans l’attente interminable qui était la nôtre depuis officiellement six jours (mais officieusement au moins vingt jours !), elle allait s’etirer devant elle, ennuyeuse et chaude et lourde…. Alors après hésitation j’ai dégainé la recette marmiton et je me suis dit toute façon j’ai rien d’autre à faire, la pâte feuilletée ça va m’occuper quelques heures, let’s do it ! C’est assez costaud et long. Après la première série de beurre-roulade-tourner la pâte je suis allée faire un petit tour à la piscine. Je n’y avait plus été depuis un moment et j’ai du mettre un maillot dépareillé tellement mon ventre avait encore pris ces derniers jours. Benoit comme d’habitude à accepter d’être mon bateau moteur, je m’accroche à son dos et il me tire, et nous avons fait quelques longueurs comme ça pendant que Aubin se faisait courser autour de la piscine par ses sœurs et ses grandparents pour une histoire de ballon. Mais j’avais ma pâte à finir, je suis donc remontée faire des roulades interminables à ma pâte et puis j’ai pris une douche. Les enfants avaient envie de dîner au bord de la piscine pour changer et Anne a preparé une salade et nous sommes ainsi descendus pique-niquer au bord de l’eau. Dans la cuisine avant de descendre je sens une « bonne » contraction. De celle où on arrête de respirer deux minutes et on se concentre. Je m’agrippe, Anne fait « ah ! ». C’était la énième depuis longtemps et je ne me suis donc pas formalisée… La nuit est tombée, nous avons dîner tranquillement sous les arbres près du jacuzzi. Il y avait du monde autour du barbecue et des enfants partout, le temps etait bon, il faisait bien meilleur dehors que dans l’appart – une petite brise qui rend la moiteur tout de suite plus tenable. Mais voilà une puis deux puis trois contractions puissantes et j’ai commencé à me poser des questions. Elles etaient vraiment intense, je ne tenais presque pas sur ma chaise. J’ai terminé de dîner et je suis remontée m’allonger un peu. Assez vite les enfants sont remontés aussi , et Benoît a entamé le coucher. Mes beaux-parents sont partis.
Encore une ou deux contractions costauds… Je suis venue m’installer sur le canapé et là j’ai eu envie très vite de ne plus rester simplement assise. Il a fallu que je me mette à quatre pattes et des sons puissants ont commencé à sortir de ma bouche… je me suis demandée s’il fallait peut etre fermer la fenêtre, qu’allait dire les voisins ? Mais je n’ai pas eu le temps de réfléchir voilà que les contractions sont devenues régulières, toute les cinq-six minutes. Entre deux je regardais Oceans Thirteen et Benoit me posait des questions parce qu’il avait râté le début du film. Il a trouvé tout de même que je commencais a lui broyer la main très fort et m’a demandé si on n’allait pas appelé Rashelle (la sage-femme) maintenant. On l’a alors appelé une première fois mais en lui disant que ce n’etait pas encore la peine de venir. Le film et les contractions s’enchaînent dans une danse étrange, chaque contraction commence dans le col et remonte, je sens la tête pousser, c’est intense, je gémis de plus en plus fort. Le film se termine. Je bois ma tisane de framboisier/réglisse, Benoit allume une bougie. J’ai mis une serviette sous moi et une autre sur la pile de coussin sur laquelle je m’appuie à chaque contraction. Je suis à genoux sur une jambe dans le canapé et l’autre par terre. Mes cris, mes râles sont finalement l’indicateur qu’il faut appeler – au moins Linda, ma doula. Elle arrive vingt minutes plus tard vers 23h30. Un océan de calme et de sérénité. Elle s’asseoit sur le pouf à côté de moi, ne dit rien, ne fait rien. C’est exactement ce dont j’ai besoin. Sa présence calme et rassurante, son regard placide. Avec elle je peux continuer à gémir. Elle demande à Benoit si nous avons appelé Rashelle aussi. La question de la piscine est soulevée. Je dis que je n’ai pas la moindre idée où j’en suis, que c’est trop tôt, enfin que je n’en sais rien. Je me sens loin de tout. Je suis clouée à mon canapé, à mes deux serviettes qui sentent bon la lessive. J’ai besoin de faire pipi. Après une contraction je me lève, je me dirige vers notre salle de bain au bout de l’appart. J’apprends après que Linda propose à Benoit de remplir la piscine pensant que je n’en avais plus pour longtemps. Benoit s’attèle à la tâche. Sur les toilettes je trouve du sang et c’est là ou j’admets enfin que c’est bon, bébé arrive sans doute ce soir, mais à peine ai-je temps de penser plus loin que je sens soudainement arriver deux contractions coup sur coup qui me font hurler, j’ai l’impression de sentir une pression immense dans mon col. Linda acourt et pile poil à ce moment là la poche des eaux rompt dans les toilettes. « Se sont tes eaux ma belle » me dit elle doucement. Impossible de penser, de faire quoi se soit maintenant, je suis dans une longue contraction/pression qui ne s’arrête plus, je me jette en avant sur le carrelage de la salle de bain, à quatre pattes, je rugit, je hurle, je crie, je jure, je tremble. Mon sexe se dilate dilate, je vois les pieds de Benoit, il est là. Je crie « Linda ! », « Benoit ! », « nononononononono » . La tête arrive. Je ne me sens pas capable de faire passer cette tête, je hurle « je ne pourrais pas le faire toute seule ». Je sens que Linda a posé une main délicate sur mon sexe, elle sait que ça peut aller très vite et la sage femme n’est pas encore là – Benoit a couru vers le telephone pendant ce temps là, Rashelle est en bas de l’immeuble, elle monte. Benoit revient. Linda lui indique que la tête est en train de naître. Je suis encore dans la même longue contraction/pression, je sens la tête qui avance avance sans jamais reculer. La tête est passée. Rashelle vient d’arriver, m’enjambe. C’est tout un cirque parce que la pièce est minuscule et je bloque la porte. Rashelle a juste le temps de s’asseoir derrière moi, les épaules arrivent, je tremble, je me sens secouée, je suis un arbre, je suis l’océan, je suis la Terre, je suis immense et puissante, je hurle encore plus fort…. Les épaules naissent et derrière ce corps qui n’en fini pas de sortir, je sens le corps plus étroit, les jambes, les pieds. Je halète, c’est fini, ma puce est là. Je me retourne, elle est allongée sur une serviette couverte de vernix et de sang – pas si en retard que ça finalement me dira Rashelle… Elle est belle, grande grande grande ! Je fais attention en passant la jambe au dessus du cordon et je la soulève. Elle geint brièvement, ne pleure pas. Je suis assise dans la pièce la plus petite de l’appartement avec mon trésor dans les bras. Je lève enfin les yeux vers Benoit qui est resté si calme tout ce temps alors que devant lui je me déchaînais, une tempête de femme, un ouragan…Je sais qu’avec lui un regard suffit, on s’est tout dit. Les minutes qui ont suivi ne sont que brouillard – nous avons découvert notre fille les yeux dans les yeux. Aubin est arrivé dans cette brume – il avait tout entendu le pauvre et s’était fait du mouron pour sa maman. Il a cru que je mourrais. Il l’a cru tellement fort qu’il est resté cloué au lit à suçer son bras. Quand il a entendu sa petite sœur il a osé se lever, un énorme suçon sur le bras. Il n’ose pas rentrer dans la salle de bain, Benoit le rassure. Elle s’appelle comment ?
Eléonore.
Benoît en profite pour reveiller les deux filles qui dorment à point fermés. Tous les trois ils entrent finalement dans la minuscule salle de bain, Adèle d’abord, puis Elvire qui se frotte les yeux, puis Aubin. Nous avions éteint la lumière et allumé la bougie Ambre-Lavande. Ces trois petits visages émerveillés dans la lueur de la bougie, dans l’odeur de lavande, nous sommes six maintenant, tous liés dans cette naissance, dans cet instant magnifique, pour toujours…. Et Eleonore qui a mis un peu de temps à ouvrir les yeux nous fixe maintenant avec un regard empreint de sagesse.
Quelle émotion.
Rassurés les enfants se recouchent.
Je suis assise sur les toilettes depuis un bon moment. Je contemple le « carnage » - le sang, les glaires, le liquide amniotique, tout est trempé, le sol, les serviettes. Linda et Rashelle s’activent, nettoient. Linda vient me laver avec un gant de toilette avec infinie douceur. Je suis honorée par ce geste si simple et si doux. Je suis couverte de méconium, de sang. Et elle est là, elle me lave avec tendresse. Il n’y a rien de sale, de négatif, tout est beau, intense, chaque geste pesé dans ma mémoire, précieux, et posé dans la petite boite de cette histoire, cette naissance, cette nuit, un 25 janvier à peine, à Singapour.
Personne ne me presse et je continue à avoir des contractions très fortes. Je décide d’aller sur le lit maintenant, j’en ai marre. Les jambes flageolent, Benoit porte Eléonore. Quelque part dans tout ce chaos le lit a été fait, des serviettes propres apportées. Des petites mains s’activent autour de moi, douce, bienveillantes, aimantes. Pour m’aider à supporter ces contractions longues et aigues. Finalement, une heure vingt après la naissance, le placenta naît à son tour. Il a fallu au corps un peu de temps pour réaliser que le fruit était sorti de son enveloppe… Rashelle me demande si je suis d’accord pour couper le cordon maintenant. Avec un morceau de ficelle stérilisé et avec infinie tendresse elle noue un nœud autour du cordon et Benoit le coupe.
Ensemble nous regardons le placenta – j’avais envie de plonger les mains dedans ma la fatigue m’en a empêché. J’ai finalement décidé de le garder, nous l’avons mis au congélateur, le temps de décider ce que nous en ferons…

Je suis reconnaissante, ça y est c’est vraiment fini maintenant. Ma mémoire est toujours brumeuse – je n’ai aucune idée de l’heure – j’aurais dit que le placenta avait mis une demie heure peut etre, quarante minutes… Je vais enfin prendre une douche, me rhabiller. Essayer de repasser les images dans ma tête – sans réelle envie de les ordonner…
Il est trois heures et demie du matin. Je me sens invincible, comblée, épuisée, vidée, forte, immense, fière, … les mots me manquent. Ce n’était pas l’accouchement à domicile que j’avais imaginé – je n’ai pas rempli d’eau ma piscine, je n’ai pas eu le temps de porter mon birthing necklace, j’ai à peine vu ma sage-femme et Benoit n’a pas attrapé le bébé. Dans les jours qui ont précédés j’ai pu faire un bout de tout cela – passer des heures sous l’eau dans ma salle de bain (dans laquelle j’ai toujours su que j’accoucherai), passer du temps en tête à tête avec Benoit, Rashelle, les enfants, Linda –

Eléonore est venue à l’heure, à son heure – elle ne pouvait pas venir à un autre moment ni autrement. Et sa venue au monde est le plus beau cadeau qu’on m’ait jamais fait. Un cadeau de vie, un cadeau sacré.

felicitations à vous 6 pour cette magnifique naissance, et un grand merci de nous faire partager ce moment si intime.

Voilà, je suis en larmes...
Quel beau récit! Quelle magnifique naissance! C'est vraiment émouvant. Et ta petite Eléonore sait vraiment ce qu'elle veut... une force de la nature!
Bravo à toi et à tout ceux qui t'ont entourée.

merci de nous faire ce beau cadeau ma Sandra, je pleure tout ce que je peux!!!

Quelle belle naissance ... Merci pour ce récit et encore une fois plein de bonheur à tous les 6...

Encore félicitations ! Je suis aussi très émue ... c'est très beau

Qu'est ce que c'est beau, j'ai les larmes qui ne s'arrêtent pas tant ton récit m'émeut... Quelle maginfique naissance, qu'elle force !
Bravo à toi et à Eléonore !

J'avais pas pu te dire félicitation,ton récit est émouvant...
félicitation ma belle et plein de bonheur dans ta nouvelle encore plus grande famille

Quel ouragan! Force, puissance, sagesse et émotion voilà tout ce qui se bouscule en moi maintenant...

Quelle magnifique arrivée

merci pour beau récit, j'en pleure

Citation :

je tremble, je me sens secouée, je suis un arbre, je suis l’océan, je suis la Terre, je suis immense et puissante, je hurle encore plus fort…. Les épaules naissent et derrière ce corps qui n’en fini pas de sortir, je sens le corps plus étroit, les jambes, les pieds. Je halète, c’est fini, ma puce est là.

Ce que tu écris est magnifique. Merci d'avoir partagé avec nous la naissance si intense d'Eléonore.

Merci et encore bravo pour cette naissance si forte et puissante.
Que d'émotions dans ton récit

des frissons, comme à chaque récit d'une naissance aussi "vraie", aussi puissante...
j'aimbe bcp aussi "ce corps qui n’en fini pas de sortir" : tu m'étonnes ! enfin, c'est mieux en longueur qu'en largeur

bravo les filles
dis donc, Aubin et Papa, ils vont pouvoir se serrer les coudes au milieu de cet ouragan femelle

j'en ai d'énorme frisson!

J'en suis toute bouleversée! Quel beau récit!

Les mots me manquent, ton recit m'a emue aux larmes... Quelle force et quelle douceur se partagent cette naissance...
Bienvenue douce Eleonore, dans la chaleur de Singapour, dans la chaleur de ton foyer, dans la chaleur de ta maman...
Merci Sandra

Merci pour ce très beau récit Tinkelbell.

Bienvenue à ta petite Eléonore!

Merci Sandra ! Merci pour ce magnifique récit !! Et bravo à vous 6 pour cette belle naissance !

Moi aussi je suis très émue de te lire! C'est puissant, beau, terrifiant et magnifique! Et ça donne envie surtout...
On devrait faire lire des récits d'accouchement comme celui là dans les fac de médecine

je suis aussi en larme devant tant de beauté, de douceur, d'amour, c'est tellement beau !!
bienvenue a Eléonore ! bravo aux heureux parents !
quelle belle naissance respectée !

Je vais quitter le forum sur ton récit pour ce soir...
Il y a eu beaucoup d'émotions et de tristesse dans les posts que je viens de lire, et ton récit, ce magnifique cadeau, me rend un peu de sérénité...

Quelle chance elle a cette petite Eléonore de t'avoir choisie pour maman...

Les mots me manquent pour te dire ce que m'inspire ton récit mais j'en suis bouleversée... merci encore...

Merci de nous faire partager ce récit, c'est une superbe naissance.
bravo à toi tu as été immense.
Plein de douces pensées pour ta famille

Merci pour ce récit, vraiment magnifique, magique...

félicitations!

Magnifique récit ma belle Sandra, toutes mes félicitations!!! je suis super émue, en larmes même...
Merci et bravo, peu de mot face à la puissance de la naissance de votre petite Eléonore, c'est tout simplement magnifique

quelle intensité! quelle force! toute la beauté d'un petit être qui nait