discutons autour de la grossesse, la naissance et le maternage... |
|
| Parler de ceux qui ne sont là | |
| | Auteur | Message |
---|
babycake Habituée
Nombre de messages : 1613 Age : 36 Localisation : paris Date d'inscription : 01/06/2014
| Sujet: Parler de ceux qui ne sont là Lun 9 Jan 2017 - 13:26 | |
| Hier, c'était réunion familiale chez ma soeur pour manger la galette. Ma mère, Milo sur les genoux, lui montre un tableau au mur : - tu vois, ce tableau, c'est B qui l'a fait, c'était mon frère. - il est où ? - il est pas là, euh.. il est mort. - pourquoi ? - euh... parce que... ça arrive. - pourquoi ? J'interviens : "parce que c'est la vie", réponse paradoxale s'il en est (pourquoi la mort? parce que c'est la vie. )
Mon oncle B était peintre, il est mort quand j'avais 8 ans. Je l'aimais beaucoup, et ma mère était très proche de son frère. Si on n'a pas répondu aux pourquoi du schtroumf, c'est parce qu'il s'est suicidé, avec un beau cocktail de médicaments. Parce qu'il était schizophrène, et qu'entre ses délires angoissants, et la léthargie induite par les anti-psychotique, il ne voyait pas de voie pour être heureux. Ça n'est pas un tabou dans ma famille, on ne me l'a jamais caché même petite, mais c'est une réponse un peu brutale pour un schtroumf de 2 ans, qui comprend à peine ce qu'est la mort.
Mais en écoutant ma mère lui parler, j'ai réalisé avec un peu de honte que mon fils ne savait qui était B, parce que je ne lui en est presque jamais parlé. Il y a des photos de lui chez mes parents et grand parents, et je l'ai déjà nommé pour lui. Ses tableaux sont aussi accrochés partout dans ma famille, mais il n'y en pas chez nous. J'ai laissé les miens dans ma chambre chez mes parents parce que je ne voulais pas les abimer dans mon 1er appart minuscule, et je ne les ai jamais récupéré. Ca donné envie de les remettre.
Je n'ai jamais non plus trouvé le temps d'amener Milo sur sa tombe, parce qu'elle est loin, alors que je voulais faire cette "présentation" depuis sa naissance (je crois que ma mère y a amener une photo, par contre). Je vais y aller maintenant, mais je m'attends à l'avalanche de question, le petit schtroumf étant bavard et curieux. Comment bien y répondre ?
B. est quelqu'un d'important dans ma famille, sa vie, compliquée, sa mort, a bouleversé tout le monde. C'est une partie de l'histoire de mon fils, aussi. Je ne veux pas qu'il l'ignore, et sans lui donné tous les détails, je ne veux pas que se soit une figure inconnue pour lui. Comment vous parler de ceux qui ne sont plus là, que vos enfants n'ont jamais connu ? Vous leur en parler, déjà ? | |
| | | Tortue verte Habituée
Nombre de messages : 1020 Date d'inscription : 12/07/2016
| Sujet: Re: Parler de ceux qui ne sont là Mar 10 Jan 2017 - 8:22 | |
| Je n'ai pas de réponse à te fournir Babycake mais je vais suivre avec intérêt cette discussion puisque j'ai moi-même perdu mon père il y a quelques années.
Si j'ai déjà pu l'évoquer ponctuellement, il est très difficile pour ma famille et moi d'en parler vraiment tellement le sujet reste douloureux. Tout comme je voulais l'emmener sur sa tombe et je ne l'ai jamais fait parce que je m'en sens pas capable. Finalement c'est un double problème faire son deuil et parler des disparus. | |
| | | Tortue verte Habituée
Nombre de messages : 1020 Date d'inscription : 12/07/2016
| Sujet: Re: Parler de ceux qui ne sont là Mar 10 Jan 2017 - 10:17 | |
| Je suis tombée sur cette biblio. Tu y trouveras peut-être ton bonheur.
http://www.seveilleretsepanouirdemaniereraisonnee.com/2017/01/biblio-selection-de-livres-jeunesse-pour-aborder-la-mort-le-deuil.html | |
| | | babycake Habituée
Nombre de messages : 1613 Age : 36 Localisation : paris Date d'inscription : 01/06/2014
| Sujet: Re: Parler de ceux qui ne sont là Mar 10 Jan 2017 - 11:25 | |
| Tortue verte, je suis désolée pour ton père. Ce doit être dur, et encore plus d'en parler alors que c'est encore frais pour toi. Ici, ça fait 20 ans cette année que B. est mort, je crois que pour moi le temps du deuil est passé.
Merci pour la bibliographie. "on va-t-on quand on disparait" me parait interessant. En fait, ce n'est pas tellement aborder la mort qui me pose problème. Peut-être parce que j'y ai été confrontée jeune, ce n'est pas un sujet qui me fait peur, et je crois que j'arrive à en parler avec mon fils. Il y en encore peu été confrontée, mais on dit que la coccinelle sur le dos qui bouge pas était morte, qu'elle avait arreter de vivre. On a expliquer aussi le pied de basilic mort, parce qu'on est parti en vacance en oubliant de se soucier de l'arrosage. Même si je crois que la notion est encore très abstraite pour lui.
Ce que je trouve plus difficile, c'est de faire vivre le souvenir. De trouver la juste dose. D'évoquer la personne qui n'est plus là, sans les embrouiller. De transmettre la mémoire de la famille, sans tabou, mais sans transmettre les traumatismes. C'est peut être bien aussi parce qu'elle n'est pas si légère, l'histoire de l'absent dont je veux lui parler. Mais faudra bien un jour lui expliquer, pourquoi la voix de sa grand-mère se noue quand elle en parle...
Mais peut-être juste commencer par les jolies choses, les tableaux incroyables ? Et je me dis en réfléchissant que peut-être bien aussi que cette mémoire, elle ne lui passera pas que par moi, mais aussi par mère, mes grand-parents... | |
| | | La Galineta Habituée
Nombre de messages : 4814 Age : 33 Localisation : Isère Date d'inscription : 29/05/2014
| Sujet: Re: Parler de ceux qui ne sont là Mar 10 Jan 2017 - 11:48 | |
| Pas simple l'histoire de ton oncle à expliquer. Ici M. a été confronté à la question de la mort quand le poisson rouge a arrêté de vivre. Ça a été progressif puisque pendant plusieurs jours/semaines avant il nageait moins bien, il avait perdu l'équilibre et virevoltait, il fatiguait alors j'ai expliqué qu'il était vieux et il arriverait bientôt plus à nager. Puis un jour il ne bougeait plus au fond de l'aquarium, M. a été secoué de voir qu'il ne pouvait plus continuer à vivre, j'ai été honnête et lui ai dit qu'on l'avait mis à la poubelle car plus jamais il ne pourrait nager. Un moment après on a remis deux poissons dans cet aquarium, et depuis il nous dit "avant j'avais un poisson, et il est mort, il pouvait plus nager". Ensuite la question a été de lui parler de mon Papa, mort quand il avait 3 mois, qu'il n'a jamais vu, enfin si il est venu aux funérailles. Nos enfants n'ont pas de grand-père, ni du côté de leur père ni de mon côté. Enfant je n'ai pas non plus connu mon grand-père paternel mais on m'en a parlé. Et là quand il m'a demandé un jour où il était mon Papa (ou si j'avais un Papa) je lui ai expliqué, tout simplement, que comme le poisson rouge un jour il était mort, il était malade et trop fatigué de continuer à vivre. Je lui ai montré en photo, je lui raconte des choses sur lui. Son père lui a aussi montré le sien en photo et lui a dit qu'il n'était plus là (je sais plus si il lui a dit qu'il était mort, c'est un peu flou autour de sa mort aussi car il a fait des tentatives de suicide, et aurait fait un infarctus), M. aime bien qu'on lui parle des gens qui sont pas là comme ça, pas là aussi physiquement car loin simplement. Après ce qui est plus compliqué c'est qu'ensuite il a voulu demander à ma petite soeur si elle avait un Papa, et lui a dit cash "il est mort ton Papa" et a rigolé, bon elle est un peu plus sensible et terre à terre sur le sujet, c'est frais, en 2013. Du coup je vais lui expliquer aussi que ça peut rendre les gens tristes de parler d'une personne qu'ils aimaient qui est morte. Je l'ai aussi entendu dans ses jeux dire "et le monsieur il est mort et on l'a jeté à la poubelle !" J'ai une soeur qui est morte du sida aussi, à l'époque du sang contaminé transfusé, et je lui ai montrée en photo, les dessins qu'on a d'elle, dit qu'elle était malade. Je pense aussi que dans votre histoire familiale, lui évoquer cet oncle en lui montrant ses tableaux, lui dire qu'il est mort parce qu'il était malade, pas une maladie comme un rhume mais dans la tête, que c'était difficile pour lui. Pour répondre au mieux aux questions des enfants sur ce sujet, surtout quand ça nous touche fort le mieux je trouve c'est de leur dire avec les mots qui nous viennent, sincèrement ce qu'on ressent, et on ment pas, il ressente bien Du courage pour ce chemin, à toi babycake, à Tortue verte aussi, car c'est pas simple et pourtant ça fait tellement partie de la vie, la mort.
Dernière édition par La Galineta le Mer 11 Jan 2017 - 15:47, édité 1 fois | |
| | | julyff Habituée
Nombre de messages : 4534 Age : 38 Localisation : Finistere Date d'inscription : 09/09/2012
| Sujet: Re: Parler de ceux qui ne sont là Mar 10 Jan 2017 - 18:00 | |
| Je m'étais beaucoup questionné, j'avais lu, quand la grand mere de Jules était mal en point. Zoé la côtoyait sur la toute fin, alors qu'elle était très diminuée et souvent incohérente. Et puis elle est partie... Zoé est venue à l'enterrement, elle avait un peu plus de deux ans. Et je me suis rendue compte que c'était dur pour nous, mais pas tellement pour elle. Ils se questionnent, nous questionnent, mais le concept est quand même difficile à comprendre... Pour la grand mere de Jules, c'était assez facile d'expliquer que "c'est la vie", que tous les êtres vivants meurent, les plantes, les animaux, nous. Et puis il y a d'autres morts plus douloureuses dont on a parlé depuis au détour de photos: ma cousine, handicapée et décédée à 16ans, ma tante qui s'est suicidée à 32 ans, ma tante morte juste avant sa naissance alors qu'elle avait une petite... Finalement j'ai abordé ça le plus naturellement possible, en trouvant des mots pas trop abruptes mais vrais malgre tout. Elle a souvent conclu les discussions en disant que c'était triste... Voici pour ma petite expérience, écouté toi, écouté le, je ne doute pas que vous trouverez le chemin | |
| | | swally Habituée
Nombre de messages : 1222 Age : 42 Localisation : Annecy Date d'inscription : 22/06/2012
| Sujet: Re: Parler de ceux qui ne sont là Mar 10 Jan 2017 - 19:25 | |
| Quel sujet... justement je bosse sur un article sur la mort pour mon blog, et j'avoue que je reviens sans cesse dessus sans réussir à publier... Ici on parle des morts, facilement. Parce qu'ils font partie de nos vies. Mais clairement, les questions derrières et les projections de chacun ne sont pas toujours évidentes. Par exemple mon père est mort, il s'est suicidé, était gravement dépressif + alcoolique... un ensemble assez glauque. L'autre jour mon fils ouvrait un truc avec ses dents, je lui explique que ce n'est pas OK pour ses dents, et mon homme rebondit justement sur mon père qui avait perdu 3 dents en ouvrant une bouteille de bière avec ses dents. Ca nous faisait marrer d'ailleurs, ce souvenir, et de pouvoir le transmettre. Là mon fils, un peu confus (4 ans), me dit "mais ton papa c'est pas Papy moustache?" Non, tu sais bien, c'est le chéri de Mamy, mais mon Papa à moi est mort (on en avait déjà parlé pleins de fois). Et là ma fille de 2 ans, qui me dit "mais tu ne peux plus lui faire de calin???" Et avant que j'ai eu le temps de répondre, mon fils a répondu "ben non, parce que quand le corps est mort il se décompose et ça pue trop pour un calin" Evidemment je suis revenue sur cette réponse spontanée Tout ça pour dire, que quoiqu'on dise, chacun a sa perception face à la mort, et chaque enfant traite l'info différemment. Mon fils est très questions, genre comment ça se passe quand on est incinéré, et le four il est quelle couleur, et comment on fera si le gars qui fabrique les cercueils il est mort, et pourquoi ça pue quand on meurt... Pour faire le deuil du chat et de son grand oncle dernièrement, il a "simplement" fallu répondre froidement aux questions, hyper détaillées (et passer pour un parent bizarre aurpès de la maitresse à qui il fait un compte rendu détaillé). Pour ma fille, c'est l'émotionnel, genre la personne ou l'animal manque, c'est horrible d'être privé d'une présence et de calins... du coup on explique aussi, que oui c'est dur, mais que, en quelque sorte la vie continue. Que la personne est dans nos pensées, et qu'on sourit en pensant à eux, qu'on pleure parfois, mais qu'avec le temps on sourit + souvent qu'on pleure. Qu'il y a d'autres personnes qui font des calins, que ça ne remplace pas, mais que ça aide un peu... Après, par exemple je ne leur ai pas (encore) dit que mon père s'était suicidé... peut être parce que je sais aussi que je vais avoir 1000 questions, et que je ne suis pas sure d'etre encore assez armée pour répondre... Mais je leur dirais, c'est sur, quand la situation s'y pretera où que j'aurai droit à une question. La justesse, c'est, à mes yeux, de ne pas anticiper les questions. De leur laisser le choix de leur croyance. De faire attention au choix des mots, à l'usage de la négation "il n'a pas souffert" sous entend qu'il aurait pu souffrir et apporte une dimension anxiogène qui n'existait pas forcément... Désolé du pavé... je réfléchis vachement là dessus en ce moment (et j'ai hate de finir mon article... enfin, d'en être assez satisfaite pour le publier!) | |
| | | Contenu sponsorisé
| Sujet: Re: Parler de ceux qui ne sont là | |
| |
| | | | Parler de ceux qui ne sont là | |
|
Sujets similaires | |
|
| Permission de ce forum: | Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
| |
| |
| |
|