Test sanguin, amniocentèse et écho morphologique: raisons et enjeux
La France est le premier pays au monde pour le diagnostic prénatal et le dépistage des malformations foetales au travers des échographies, du dosage de certains marqueurs sériques (présents dans le sang et dont les concentrations anormales peuvent être associées à une trisomie) et de l'amniocentèse.
Les trois examensLe triple test ou tritest Le triple test est un examen sanguin destiné à améliorer le dépistage de la trisomie 21 et de la non fermeture du tube neural chez l'enfant à naître.
Il s'agit d'une prise de sang, permettant de doser trois produits sanguins (l'HCG bêta, l'alpha foeto protéine et l'oestriol). Ce test doit impérativement être pratiqué entre la 14ème et la 18ème semaine après le début des dernières règles (semaines " d'aménorrhée "). On le combine à la mesure de la " clarté nucale " lors d'une échographie pratiquée à 11 ou 12 semaines d'aménorrhée et à l'age de la mère pour obtenir ce qu'on appelle le risque calculé.
Les résultats sont rendus en une dizaine de jours. Le résultat est exprimé en pourcentage de risque de trisomie 21
Si le test HT 21 donne une probabilité de trisomie supérieure à 1/250 (soit une chance sur 250 d'avoir un enfant trisomique), on estime que ce risque justifie de pratiquer une amniocentèse qui, seule, permettra d'affirmer ou d'écarter ce diagnostic. Plusieurs choses doivent être bien comprises :
un résultat d'HT 21 " positif " signifie seulement que le risque de trisomie est supérieur à 1/250. Il ne signifie absolument pas que l'enfant est trisomique, mais seulement qu'il faut pratiquer une amniocentèse
a contrario, un résultat d'HT 21 " négatif " ne signifie pas non plus que l'enfant n'est pas trisomique, mais simplement que la probabilité qu'il le soit est très faible (inférieure à 1 chance sur 250), et qu'elle ne justifie pas de prendre le risque d'une amniocentèse
Pour info, un taux de 1/250 signifie que pour 250 amniocentèse pratiquées, il y aura un cas de T21, donc 0,4% de risques.
La fiabilité de cet examen est d'environ 60% et source de grande inquiétude pour les futures mamans .
L'amniocentèse L'amniocentèse consiste en un prélèvement de liquide amniotique. C'est dans ce liquide que vit et évolue le fœtus durant la grossesse. Cet examen est possible à partir de 13/14 semaines d'aménorrhée jusqu'au terme de la grossesse. Le prélèvement est réalisé à l'hôpital, de manière stérile, dans une salle spécifiquement dédiée à cet examen. On prélève le liquide grâce à une aiguille très fine (sans anesthésie : l'anesthésie est plus douloureuse que la ponction elle-même) à travers le ventre maternel, sous contrôle échographique permanent. Le but est d'y étudier et identifier un certain nombre d'éléments.
Le plus souvent, ce sera pour établir le caryotype fœtal. Cette étude correspond à l'examen des chromosomes du fœtus effectué sur ses cellules, provenant essentiellement de sa peau. Le premier des désordres recherché sur ces Chromosomes est une anomalie de leur nombre : excès ou défaut d'un ou plusieurs chromosomes. La plus fréquente est la trisomie 21 ou Mongolisme. L'âge maternel, plus de tente huit ans au jour de la ponction, des signes détectés à l'échographie ou la notion d'un triple test anormal sont les principales situations qui conduisent à la suspecter. On peut aussi avoir à étudier ces chromosomes un peu plus en détail, dans leur structure même, et rechercher des anomalies de construction du chromosome : perte, addition d'un morceau de chromosome ou autres bizarreries architecturales, inversion, translocation…
Du fait de la faible quantité de cellules fœtales retrouvées dans le liquide amniotique, on est le plus souvent obligé de passer par une phase de culture cellulaire qui consiste à les faire se multiplier afin d'en avoir un plus grand nombre à étudier. Cette étape de culture est responsable des délais de réponse du caryotype fœtal pouvant aller d'une huitaine à une vingtaine de jours. On développe actuellement des techniques beaucoup plus rapides qui vont consister à "révéler" la présence d'un chromosome en trop, le 13, 18 ou 21, à l'aide d'une "sonde" (une sorte de tête chercheuse). Cette technique directe est sélective et ne peut pas servir à rechercher d'autres anomalies chromosomiques. Elle est réservée aux cas où l'anomalie, la trisomie, est fortement suspectée, à proximité du terme, devant une découverte échographique évocatrice.
Cet examen n'est pas sans danger puisque qu'il expose à des risques d'avortement spontané (par microfissuration des membranes) dans un pourcentage allant de 0,5 à 1% des cas, voire, semble-t-il, un risque ultérieur d'accouchement prématuré à 25 ou 26 semaines.
L'échographie morphologiqueL'exploration échographique est basée sur le principe d'émission des ultrasons par une sonde, ces ultrasons vont pénétrer dans l'organe à explorer, puis par plusieurs phénomènes physiques, et en particulier la réflexion, une partie de ces ultrasons vont revenir à la sonde qui va les transformer en signaux électriques, ces signaux, une fois traités par l'appareil d'échographie vont apparaître sur l'écran et sur les clichés échographiques en forme d'images, mais bien sur, elles ne sont pas des photographies en noir - blanc ou en couleurs de l'organes étudiés ; elles ne sont que les ombres de cet organe et l'échographie, en vérité, est une étude des ombres. Ce qui dit des ombres il peut dire qu'il y a de temps en temps des points d'ombres invisibles ou d'interprétation impossible, ce qui explique que l'on ne peut pas voir tout à l'échographie et qu'une échographie fœtale normale n'est pas toujours égale à un enfant normal.
Toutes les études mondiales montrent que l'échographie obstétricale ne détecte que :
• 60 % des malformations fœtales et
• 75 % des fœtus atteints par la trisomie 21.
L'échographie du deuxième trimestre de la grossesse (échographie morphologique) est réalisée habituellement entre 22 et 24 semaines d'aménorrhée Elle permet d'évaluer la croissance fœtale. D'autres mesures sont pratiquées dans un but de mettre en évidence des anomalies morphologiques fœtales détectables par l'échographie en sachant que :
• seulement 86 % des malformations du cerveau et de la moelle épinière sont détectables par l'échographie ;
• seulement 42 % des malformations graves du cœur sont détectables à l'échographie ;
• seulement 25 % des fentes labiales (bec de lièvre) sont détectables par l'échographie
• seulement 85 % des malformations graves des reins et de la vessie sont détectables par l'échographie ;
• seulement 67 % d'absences complètes d'un membre sont détectables par l'échographie ;
• et que le taux de dépistage global par échographie des malformations fœtales est de l'ordre de 60 %.
Mais la recherche de ces signes ne permet de diagnostiquer que 75 % des cas de la trisomie 21, même si ce dépistage a été réalisé par les meilleurs échographistes et en utilisant les meilleurs appareils d'échographie ; donc il existe des fœtus atteints par la trisomie 21 avec une échographie morphologique normale (un trisomique sur quatre).
Tous ces examens servent à évaluer le développement et la « normalité » du fœtus. Les médecins, en multipliant les examens se protégent d'éventuelles poursuites judiciaires attentées par les parents en cas de malformations du bébé. Les parents se rassurent dans le mythe de l'enfant parfait.
La France est sans doute l'un des pays où l'on a le plus ambitieusement développé le diagnostic prénatal. C'est aussi celui où l'on pratique le plus d'IMG: 7 000 par an en moyenne, entre le cinquième et le sixième mois de grossesse. Au début des années 80, les premiers échographistes avaient des équations relativement simples à résoudre: la technologie ne leur permettait de déceler que les très grosses malformations du fœtus.Puis, au fil du temps, on est parvenu à avoir une image de plus en plus précise, et précoce, du fœtus. La question de l'interruption de grossesse s'est posée de façon de plus en plus complexe. Très vite, il a fallu opérer des choix d'une crudité glaçante: si les parents refusent d'avoir un enfant nain ou trisomique, doit-on accéder à leur désir d'avorter? Si leur bébé est atteint d'une maladie grave du cerveau, génératrice de prévisibles souffrances, doit-on convaincre une mère rétive d'interrompre sa grossesse? Si le fœtus présente un bec-de-lièvre - opérable par la suite - ou une malformation de la main ou du pied que les parents rejettent violemment, doit-on leur imposer cet enfant? Derrière ces dilemmes se profilent d'autres débats, plus collectifs, passionnants si l'on accepte d'en peser sereinement les enjeux éthiques. Question de rapports de force: entre la mère, qui porte le bébé dans son ventre, le père, qui endosse avec elle la responsabilité de l'enfant, le médecin, qui détient l'autorité scientifique, le législateur, qui pose les limites, comment doit se partager le pouvoir? Doit-on obéir à la douleur, au désir, ou au savoir? En fonction de quelle morale? Jusqu'à quel point doit-on obtempérer à l'exigence moderne d'enfant parfait? Ne risque- t-on pas de céder à la tentation eugéniste? Doit-on mettre au monde des enfants que leur handicap risque de rendre terriblement malheureux, et leurs parents avec eux ?
Ces questions sont surtout agitées par les suites de l'arrêt Perruche. En novembre 2000, la Cour de cassation a donné raison à une caisse d'assurance-maladie et à des parents qui demandaient, au nom de leur enfant handicapé, une indemnisation pour le préjudice d'être né: en clair, si le cas Nicolas Perruche avait été convenablement diagnostiqué, les parents auraient demandé, et sans doute obtenu, une IMG. D'autres actions, intentées par d'autres parents au nom de leur enfant, sont en cours pour demander à la justice d'indemniser ces vies dont on aurait préféré se priver.
Dans le quotidien des cabinets des échographistes ou des centres de diagnostic prénatal, ces questions surgissent toujours de façon sourde, dans un contexte d'émotion et de tragédie. «L'échographie n'est pas un acte médical, c'est une bombe que vous avez entre les mains, insiste François Farges, échographiste à Paris. Quand je diagnostique une malformation, chaque mot que je prononce est un traumatisme pour les parents. »
Mais qu'en est il de ces « malformations ponctuelles » qui angoissent les parents, entraînent des amniocentèses, pour finir par l'annonce d'un bb en pleine forme, bonne nouvelle il est vrai mais au prix d'angoisses terribles. Beaucoup de parents, et spécifiquement des mères se trouvent coupées de cet enfant, préférant ne pas s'attacher dans l'attente des résultats, au mieux, jusqu'à l'accouchement et la « certitude » de visu que l'enfant va bien, voir parfois plusieurs mois ou années après la naissance.
Qu'en est-il de ces échographies pratiquées par du personnel peu qualifiés pour ces dépistages obstétricales, qui alertent sur d'éventuels soucis à confirmer, ou au contraire ne parviennent pas à faire une bonne exploration. Chaque année en France, pour 800 000 grossesses, 2,7 millions d'échographies fo etales (de dépistage et de diagnostic) sont réalisées dont 800 000 dans le secteur libéral. Par qui ? Les sages-femmes, pour une petite part d'entre elles, et trois catégories de médecins : les obstétriciens (à l'origine de 2 % des examens), les radiologues (34 %) et les généralistes (13 %), 'échographie foetale étant pour ces derniers un mode d'exercice exclusif. impossibles à identifier parce que n'ayant pas d'étiquette spécifique pour cette pratique, les échographistes foetaux sont difficiles à compter. Ils seraient quelques milliers, 500 auraient un exercice exclusif.
Au nom du principe de précaution, voire d'un excès de précautions, des femmes enceintes de plus en plus nombreuses subissent des amniocentèses, cet examen qui consiste à faire une ponction de liquide amniotique sous échographie afin de recueillir des cellules foetales pour déceler d 'éventuelles anomalies chromosomiques (trisomie 18 ou 21) ou génétiques. avec une moyenne de 11 à 12% pour l'ensemble des 750 000 Françaises qui attendent un bébé, soit plus de 80 000 examens par an (contre 18 000 en 1 988), un pourcentage qui passe même à 16% en Ile-de-France.
«La pratique de ces examens ne cesse de s'accroître depuis quelques années a lors qu'ils exposent à des risques d'avortement spontané (par microfissuration des membranes) dans un pourcentage allant de 0,5 à 1% des cas, voire, nous semble-t-il, un risque ultérieur d'accouchement prématuré à 25 ou 26 semaines», a déclaré le Pr René Frydman, chef du service de gynécologie-obstétrique et médecine de la reproduction à l'hôpital Antoine-Béclère de Clamart, à l'occasion d'un débat organisé cette semaine par le Pr Claude Griscelli, président de la fondation Wyeth-Lederlé .
Tant et si bien aujourd'hui qu'à trop vouloir bien faire, on provoque plus d e fausses couches chez des femmes qui portaient un futur bébé parfaitement normal que l'on ne détecte d'anomalies graves, susceptibles ou non 'ailleurs (selon les sensibilités religieuses ou éthiques des parents) de conduire à une interruption médicale de grossesse (IMG) souvent très mal vécue tant par le couple que par l'équipe soignante. A ce propos, seuls 44% es couples sur Paris intra muros choisissent alors une IMG, dont l'immense majorité en cas d'anomalies extrêmement graves, les autres préférant accepter la naissance.
Pour le Pr Frydman, «cette multiplication des amniocentèses par excès de précaution pose un problème de santé publique majeur. Il est absolument nécessaire d'expliquer aux femmes les enjeux et les risques de cette technique car on sait très bien qu'il est très facile d'inquiéter une femme enceinte et de lui proposer toute une batterie d'examens pour la rassurer». t aussi parce que les médecins, inquiets de la judiciarisation grandissante es actes médicaux, cherchent de plus en plus à se couvrir en multipliant t ests et analyses surtout chez des femmes de plus de 35 ans où les risques d e survenue d'anomalies chromosomiques commencent à très légèrement augmenter.
Claire Moncourtois
Sources :
http://www.lexpress.fr/info/societe/dossier/nicolas/dossier.asp?ida=425407
Diagnostic prénatal de la trisomie 21 (ESCULAPE)
Dépistage de la trisomie 21 (site de l'académie de Versailles)
Diagnostic Prénatal de la Trisomie 21.Brochure réalisée par ungroupe de travail réuni à l'initiative de la Commission Nationale de Médecine et de Biologie de la Reproduction et de Diagnostic Prénatal.MINISTÉRE DU TRAVAIL ET DES AFFAIRES SOCIALES.INSTITUT NATIONAL DE LA SANTÉ ET DE LA RECHERCHE MÉDICALE.COMITE FRANÇAIS D EDUCATION POUR LA SANTE .
Evaluation du risque de trisomie 21 et de spina bifida par l'analyse du sang de la mère. Brochure émise par le Centre Universitaire Wallon de Génétique. Responsable: Alain Verloes.
http://www.quotimed.com/journal/index.cfm?fuseaction=viewarticle&DArtIdx=208933
Trop d'amniocentèses pratiquées en France Www.lefigaro.fr
http://femiweb.com/gynecologie/examens.htm
http://www.paris-nord-sftg.com